dimanche 21 octobre 2007

Les années métaphysiques

Lucien COUTAUD - 1944 ~ 1947




LES ANNEES METAPHYSIQUES


Exposition Galerie Marion Meyer, Paris, du 20 novembre 1997 au 17 janvier 1998.







Né le 13 décembre 1904, décédé le 21 juin 1977, Lucien Coutaud, très lié au monde du théâtre et à celui des arts décoratifs dans les années 30, quoiqu’il tenait à être considéré avant tout comme peintre, sa vraie vocation, verra son nom véritablement reconnu au décours des années sombres, des années d’Occupation, devenant une des figures majeures de l’art de l’immédiat après-guerre, de la Jeune Peinture Française.

Introduit dans le monde des lettres, il fréquente au début des années 40 Georges Hugnet, Paul Eluard, Robert Desnos, Jean Paulhan, Jean Blanzat avec qui il s’était lié d’amitié dès 1929. Il entretient des liens amicaux avec des peintres comme Jean Bazaine, Jacques Despierre, Alfred Courmes, Félix Labisse et noue quelques relations avec Picasso. En 1942, il est l’un des «Vingt jeunes peintres de tradition française» qui exposent à la Galerie Braun, première manifestation d’Art d’avant-garde sous l’Occupation. En 1944, il est autour de Gaston Diehl l’un des membres fondateurs du Salon de Mai. Après la guerre, on le verra se lier d’amitié avec Lise Deharme, Oscar Dominguez, Boris Vian, fréquenter l’univers de Saint-Germain des Prés sous le signe du jazz et de l’existentialisme.

Dès 1940, l’on pouvait remarquer dans sa peinture les prémices d’un bouleversement en profondeur de son art et sa manière de peindre qui ne tardera pas à être on ne peut plus manifeste. Cette année là, on peut découvrir ses fruits en ville, avec les premiers fruits tranchés et à leurs côtés un ou plusieurs couteaux. Le peintre au nom tranchant joue indubitablement avec l’homophonie. La présence de grenades parmi ces fruits n’est de plus pas non plus anodine. Fin 1942, Coutaud compose ses premiers squelettes de fruits, ultime avatar de la pomme de Cézanne. En 1943, il est le décorateur reconnu et admiré du «Soulier de Satin» de Paul Claudel mis en scène par Jean-Louis Barrault à la Comédie Française, une parenthèse dans sa création, reconnaissant lui-même ce travail beaucoup trop éloigné de sa peinture. «Il vaut mieux ne pas en parler». Un séjour aux Baux de Provence durant l’été à l’invitation de Pierre Delbée, le marque profondément. En 1944, tout se précipite. L’univers du peintre devient sombre, inquiétant, agressif, marqué par l’influence de l’oeuvre de Franz Kafka et surtout (à partir du mois de juillet de la même année) par l’influence de celle de Raymond Roussel dont il transpose le procédé dans son propre champ pictural, devenant le premier grand redécouvreur de Roussel. Coutaud travaille tout d’abord à une série de peintures sur le thème de la ville, des rues et des places («La rue étoilée», «La maison jaune», «La maison rose», «La nuit rue des plantes», «Trois nuages bleus sur la place verte», «Cité végétale»...). Dans cet univers en apparence chiriquien reprenant les couleurs du maître de la Métaphysique, détournement voulu du peintre, tout en gardant ses distances, en conservant son originalité, viennent se dresser devant nous des personnages tout aussi inquiétants, aux corps articulés, puis plus tard scindés, morcelés, mannequins encore, ou robots déjà, on ne sait. Les visages de Monégasques de la fin de 1944 et du début de 1945 sont des visages d’existentialistes. Les personnages aux fers à repasser («Les sept fers» de 1944, «La demoiselle des fers» de 1945...), ceux présentant un squelette de fruit, sont leurs semblables. Ce sont également des personnages rousselliens. On reste dans l’absurdité préméditée. Coutaud connaissait, à n’en pas douter, cette anecdote, d’authenticité en fait discutable, qui voulait que Raymond Roussel ramena à un ami ou plutôt à une amie, vraisemblablement Charlotte Dufrène, de l’un de ses lointains voyages, un fer à repasser, le présentant comme l’objet le plus extraordinaire qu’il ait jamais trouvé. Pour «Le Poète», un ballet de Boris Kochno et Roland Petit sur une musique de Benjamin Godard, représenté au Théâtre Sarah Bernhardt en juin 1945, Coutaud conçoit un décor reprenant le thème des arbres aux yeux peints ces derniers mois («Arbres aux yeux doux» de décembre 1944, «Fragment du verger aux yeux» de mars 1945) et les danseurs et danseuses du ballet sont affublés de masques comme les personnages de ses peintures et coiffés de fers à repasser ou de squelettes de fruits. La Porteuse de pain à l’origine de nombreuses peintures en 1945 - 1946 est un personnage emprunté à un roman feuilleton populaire, de la fin du XIXème siècle, de Xavier de Montépin. Coutaud nous la montrera à de nombreuses reprises, imaginant ses aventures, nous fera connaître ses paysages familiers, son entourage. On verra même la Porteuse de pain et son amie rencontrer un enfant au cerceau, Kafka enfant, autre thème d’inspiration de l’artiste... Un séjour sur la côte catalane, à l’invitation du peintre Willy Mucha, l’été 1945, conduira des Catalanes, Dames de Collioure ou Dames de C., à Mademoiselle Phèdre de 1946, figure majeure, figure emblématique, dans l’oeuvre de l’artiste, une oeuvre évoluant en permanence sous le signe de la métamorphose. En 1947, Coutaud nous fait assister à la fin tragique de la Porteuse de pain croquée ou aspirée par un «dormeur», personnage récurrent dans sa peinture, et ce sera alors l’entrée du Marquis de Sade et de son château de Lacoste dans son univers à la suite d’un travail d’illustrations pour un recueil poétique de Gilbert Lely, «Ma Civilisation», édité par Aimé Maeght en janvier 1948. La découverte de Belle-Ile en Mer, l’été 1948, celle d’une nouvelle lumière, marquera la fin de cette période dite métaphysique.

En cette époque d’intense création artistique, Coutaud expose régulièrement dans les principaux salons de peinture. Il présente notamment «La nuit rue des Plantes» et «Trois nuages bleus sur la place verte» au Salon des Tuileries de 1944, «Moulins à moudre le temps (dédiés à Raymond Roussel)», évocation de «Locus Solus», au Salon d’Automne de la même année, «Les sept fers» de 1944 au premier Salon de Mai en 1945, «En rase campagne, jeune porteuse de pain métamorphosée en chaise» au Salon d’Automne de 1945, «L’escalier de Mademoiselle Phèdre» (toile appartenant à présent au Musée National d’Art Moderne) au Salon d’Automne de 1946, «L’armoire-chair de la porteuse de pain» au Salon de Mai de 1947, «Le château de X et les environs du verre de lampe» au Salon d’Automne de la même année, «L’habitant du Château» au Salon d’Automne de 1948. Il participe également à un certain nombre d’expositions collectives. Il présente en particulier à l’exposition «Le nu dans la peinture contemporaine», organisée à la Galerie René Drouin en avril 1944, une toile titrée «Le modèle» (connue également sous le titre «Vive la mariée nocturne») et à l’exposition «l’oeuvre et sa palette», organisée à la Galerie Breteau en mai 1944, «Les deux soeurs de la lune». En mai - juin 1945, il participe à l’exposition consacrant la «Jeune peinture française» organisée au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles. Enfin trois expositions particulières marquent cette période. Du 7 au 25 mai 1946, la Galerie Roux-Hentschel présente un ensemble de ses oeuvres des années 1944, 1945 et du début de 1946. Du 17 janvier au 7 février 1947, la Galerie Bonaparte présente un ensemble de ses dessins et aquarelles (ou plutôt essencerelles, technique où l’eau est remplacée par l’essence) des mêmes années. Du 29 novembre au 13 décembre 1947, la Galerie Jérôme à Bruxelles lui consacre également une exposition très remarquée d’oeuvres de cette époque. L’été 1948, Coutaud est invité à la Biennale de Venise et du 9 au 30 novembre 1948 une exposition particulière lui est consacrée par la Galerie Maeght à l’occasion de la présentation de «Ma Civilisation» de Gilbert Lely.

Compagnon de route des peintres abstraits dans l’aventure de la Jeune Peinture Française et celle du Salon de Mai, maître de la figuration onirique à la grande époque de l’abstraction, considéré en 1946 par Bernard Dorival comme l’un des liquidateurs du surréalisme, Lucien Coutaud conservera toute sa vie une superbe indépendance et son oeuvre restera, quels que soient les points de repères laissés ici ou là, aussi énigmatique que celle du De Chirico de l’époque de la Metafisica, lui qui considérait De Chirico et Paul Klee comme les seuls maîtres qui l’aient réellement influencé, si l’on doit le croire.

LISTE DES OEUVRES SELECTIONNEES


1. PEINTURES

Le pain, huile sur toile, 36 x 80 cm, 1943.
La nuit jaune, huile sur toile, 46 x 65 cm, 1943.
La rue étoilée, huile sur toile, 65 x 93 cm, 1944.
La maison jaune, huile sur toile, 33 x 41 cm, 1944.
La maison rose, huile sur toile, 38 x 46 cm, 1944.
La nuit rue des plantes, huile sur toile, 36 x 79 cm, 1944.
Rue des plantes, huile sur toile, 50 x 61 cm, 1944.
Rue de l'enchanteur, huile sur toile, 46 x 65 cm, 1944.
Trois nuages bleus sur la place verte, huile sur toile, 36 x 78 cm, 1944.
Cité végétale, huile sur toile, 60 x 92 cm, 1944.
Les deux soeurs de la lune, huile sur toile, 61 x 38 cm, 1944.
Personnage tourmenté, huile sur toile, 22 x 16 cm, 1944.
Nature morte, huile sur toile, 16 x 22 cm, 1944.
Le poulet, huile sur toile, 36 x 78 cm, 1944.
Vive Landru, huile sur toile, 19 x 24 cm, 1944.
Devant sa fenêtre, huile sur toile, 24 x 41 cm, 1944.
Ils attendent, huile sur toile, 46 x 61 cm, 1944.
Deux fers près de l’armoire à glace, 81 x 100 cm, 1944.
L’arbre aux yeux doux, huile sur toile, 50 x 61 cm, 1944.
Fragment du verger aux yeux, huile sur toile, 81 x 116 cm, 1945.
3ème monégasque, huile sur toile, 35 x 27 cm, 1946.
Tête, huile sur panneau, 18 x 14 cm, 1945.
Sans titre (Fer), 55 x 46 cm, 1945.
La demoiselle des fers, huile sur toile, 82 x 55 cm, 1945.
Marine 1, huile sur toile, 27 x 46 cm, 1945.
Barques à Collioure, huile sur panneau, 14 x 18 cm, 1945.
La porteuse de pain et son amie vont rencontrer l'enfant, huile sur toile, 60 x 73 cm, 1946.
Intérieur à la pendule, huile sur toile, 60 x 73 cm, 1946.
La soeur du veilleur de nuit, huile sur toile, 32 x 19 cm, 1946.
Intérieur vert, huile sur toile, 50 x 73 cm, 1947.
2ème nature morte aux pains, huile sur toile, 50 x 61 cm, 1947.
Arbres, huile sur toile, 28 x 26 cm, 1947.
Arbres à pieds blancs, huile sur toile, 38 x 46 cm, 1947.

Personnage d'août, huile sur ardoise, 19 x 12 cm, 1955.


2. GOUACHES - ESSENCERELLES

L'homme des arbres, essencerelle sur papier, 65 x 48 cm, 1945.
La sieste, essencerelle sur papier, 30 x 45 cm, 1945.
Jeune printanier, essencerelle sur papier, 34 x 25 cm, 1945.
Jeune ange, essencerelle sur papier, 45 x 30 cm, 1945.
Suite au matin, essencerelle sur papier, 45 x 30 cm, 1945.
Le personnage mauve, essencerelle sur papier, 43 x 28 cm, 1945.
Toréro, essencerelle sur papier, 47 x 30 cm, 1945.
Nu Jaunesque, essencerelle sur papier, 45 x 30 cm, 1945.
2ème hommage à Raymond Roussel, essencerelle sur papier, 50 x 36 cm, 1944.
2ème étude du dormeur, essencerelle sur papier, 30 x 42 cm, 1946.
Femme à l'escalier, essencerelle sur papier, 63 x 48 cm, 1946.
La tour et environs de F., essencerelle sur papier, 32 x 40 cm, 1946.
Jeune fille des Baux, gouache sur papier, 25 x 33 cm, 1947.
Paysage estival, gouache sur papier, 18 x 25 cm, 1947.

Jambe le matin, gouache sur papier, 26 x 40 cm, 1951.
Paysage sans jambe, gouache sur papier, 26 x 40 cm, 1951.
Intérieur nuageux, gouache sur papier, 25 x 34 cm, 1954.

L’exposition est complétée par une sélection de documents de la période concernée et un exemplaire de «Ma Civilisation» de Gilbert Lely édité par Maeght en 1948, exemplaire de tête dédicacé à Lise Deharme avec une suite en premier état et un dessin original à la plume - sur-illustré à la gouache - représentant le Marquis de Sade et son château : «Pour Lise à dessein, ce dessin de mon amitié pour elle. 30. 11. 48».

Ont été joints à cet ensemble «Dimanche des rameaux» de 1958 et quelques oeuvres de la dernière période de l’artiste.







Itinéraires
de
fers




L’intrusion des fers à repasser dans la peinture de Lucien Coutaud correspond indubitablement au début de ses hommages à Raymond Roussel, à son intérêt idolâtre pour la vie et l’oeuvre de Raymond Roussel. Une légende tenace, mais peut-être y a-t-il une part de vérité, voulait que Raymond Roussel ramena de l’un de ses voyages en guise de cadeau, de souvenir, un tel fer. Coutaud aurait pu apprendre cette anecdote au début des années 40 par Michel Leiris, par d’autres encore qu’il fréquentait à cette époque, peut-être avant par Roger Vitrac, ou la lire dans les souvenirs discutables de Maurice Sachs. A ce choix électif du fer à repasser devenu pour Coutaud objet d’investissement, objet plastique, objet pictural, s’associe, c’est très probable, l’image d’autres fers réels ou imaginaires connus de l’artiste : le célèbre «Cadeau» de Man Ray, objet dadaïste par excellence, récupéré ultérieurement comme objet surréaliste, d’autres fers plus communs qui auraient dû, aux dires de Georges Hugnet, figurer à l’Exposition Internationale du Surréalisme de 1937, les entraves... en fer à repasser d’Ubu enchaîné d’Alfred Jarry en tant qu’objets pataphysiques. Toujours est-il que «les fers à repasser de Monsieur Coutaud» susciteront beaucoup d’interrogations dans le monde de l’art, feront couler beaucoup d’encre dans le microcosme des critiques d’art, au point que la véritable histoire du fer, des fers, l’histoire d’un détournement, en sera pour très longtemps occultée. Coutaud lui-même, d’ailleurs, aura tout fait pour en brouiller les pistes.


«Nous sortîmes du café, puis nous entrâmes dans un magasin qui étalait, en devanture, des ustensiles de ménage, de toute sorte. Je remarquai un fer - le genre utilisé sur les poêles à charbon -, demandai à Satie d’entrer et, avec son aide, j’achetai une boite de clous de tapissier et un tube de colle. De retour dans la galerie, je collai une rangée de clous sur le plat du fer ; j’intitulais le tout : «Le Cadeau» et l’ajoutai à l’exposition. C’était le premier objet dadaïste que je fabriquais en France» [1921].

Man Ray, «Autoportrait», Editions Robert Laffont, 1964.


«Le scandale de l’année [1922], c’est Locus Solus, de Raymond Roussel, au Théâtre Antoine.
Roussel a quelque chose de fou et de génial. C’est un riche bourgeois excentrique.
Il imagina un jour de se rendre en roulotte au Japon. [...].
Tout alla bien jusqu'en Chine. Là, on le hissa avec sa roulotte sur un navire en partance pour traverser la mer de Chine. Mais dès qu’on eut jeté l’ancre, le paysage japonais lui déplut et l’envie de visiter cet empire lui passa sur-le-champ. Pourtant comme il avait juré à son meilleur ami de lui rapporter un souvenir, il descendit une heure à terre et fit l’acquisition d’un fer à repasser qu’il rapporta à cet ami, et repris aussitôt la route vers la France».

Maurice Sachs, Au temps du boeuf sur le toit, 1939.

(C’est l’une des versions de l’histoire du fer à repasser rapporté par Raymond Roussel... certainement la plus contestée, bien que publiée. D’autres versions rapportées par des proches de Roussel voudraient que ce soit à son amie Charlotte Dufrène que Roussel rapporta un fer à repasser comme souvenir extraordinaire de l’un de ses voyages).


«Père Ubu - Et on est en train de me forger, Madame, mon grand carcan de fer à quatre rangs ! [...] C'est tout du solide, du même métal que nos boulets, non point du fer-blanc, ni du fer doux, mais du fer à repasser !»

Alfred Jarry, «Ubu enchaîné», Acte III, scène III.


"Les fers à repasser, les structures mi-réelles, mi-squelettiques des formes, ne sont pas là pour étonner, mais surgissent dans l'oeuvre, comme à d'autres époques, pour des raisons d'importance semblables, surgirent les couchers de soleil, les fesses, les pommes et la nappe, et plus près de nous la guitare, la pipe et la femme tête de montre à remontoir."

Lucien Coutaud, extrait d’une lettre à Georges Limbour, 18 mars 1945.


«[...] Pourquoi ce fer ? Il ne peut avoir qu'une signification dramatique et métaphysique [...]»

Georges Limbour, Dimanche Paysage, 8 juin 1945.


«[...] Les aventures plastiques du fer à repasser, de la lampe et de l’armoire depuis longtemps je les attends avec impatience [...]».

Georges Limbour, préface au catalogue de l’exposition Coutaud à la Galerie Roux-Hentschel, 1946.


«[...] Ses tableaux sont peuplés d’une étrange humanité où le fer à repasser tient une place obsédante [...]».

Bernard Champigneulle, XXè Siècle, 29 mai 1946.


«[...] Depuis quelques années Picasso nous a montré que la cafetière, comme la guitare, ou le fer à repasser de Lucien Coutaud, ou comme le miroir, sont un motif pictural susceptible de toutes les transformations magiques échappant aux explications des critiques d’art. [...]».

André Wollard, «Picasso», Le Pays, 21 juin 1946.


«[...] Coutaud, qui achève sa série de fers à repasser, symbole de l’armure moderne et de toutes les folies de notre siècle métallique et surréaliste. [...]».

Michel Florisoone, Arts, 28 septembre 1945.


«... Un spectacle naturel, une lecture frappent-ils Coutaud : quelques pages de Kafka par exemple, ou bien la vue, dans une poubelle, d’un vieux fer électrique cassé ? Voici que l’imagination se met en branle : «Un fer électrique, est-ce assez mystérieux ?» me disait-il tout récemment, devant plusieurs toiles dont cet objet inoffensif constituait sinon le sujet, du moins le noyau du thème. Autour des différentes images que cet ustensile ménager suscite dans son esprit, d’autres se groupent, de même nature, et le tableau en naît, où le fer électrique, enveloppé par d’autres objets, orchestré, si je puis dire, par des formes harmoniques, comme des phrases musicales dans une symphonie, n’est plus qu’un élément d’une vision poétique, et cristallise telle idée de Coutaud sur la vie» [...]»

Bernard Dorival, «Les étapes de la Peinture Française Contemporaine», Tome troisième. Editions Gallimard, 1946.


"Monsieur Claude Mauriac nous rapporte un propos de François Mauriac qui est allé voir au Musée Galliera "les peintures méconnues des églises de Paris". Et là, devant quelques navets indiscutables comme "La manne" de Philippe de Champaigne ou "La circoncision" de Malosso, il s'est dit que ces peintres de la figure humaine le touchaient infiniment plus que les fers à repasser de monsieur Coutaud. Cela prouve simplement que ni M. Coutaud, ni nous, n'appartenons au même siècle que M. François Mauriac (on s'en doutait). Encore moins à la même religion. Car lorqu'on pense à l'indigence des compositions du 17ème siècle français (Vouet, Vignon, Stella, Largillière, etc...) la peinture de M. Coutaud et de quelques autres apparaît comme un miracle. Voici enfin le déchirement, l'éclatement, l'érotisme et la mort. Voici enfin la célébration de l'homme. Au milieu des fers à repasser, des armoires à glace et des escaliers, ne vous en déplaise aussi légitime et plus urgent aujourd'hui que les tableaux creux d'un Caravage, sinon d'un des Carrache. [...]"

Auteur non identifié, Juin, 18 juin 1946.


«Coutaud peintre «zazou» a lui aussi des modèles, ce sont des fers à repasser. Sa collection est la plus complète qui soit au monde.»

Images du monde, 4 février 1947.

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